Conserves lactofermentées

Tutorial de avatarLow-tech Lab | Catégories : Alimentation, Santé

Introduction

Ce tutoriel est réalisé en collaboration avec Claire Yobé, pratiquant la lactofermentation depuis plus de 30 ans et formatrice sur le sujet.

L'objectif est de pouvoir conserver facilement sur le long terme des surplus de légumes issus du jardin (en été par exemple) ou d'un achat trop important par rapport au besoin.

Chiffres clés sur le gaspillage alimentaire

  • 1/3 des aliments produits dans le monde est perdu ou gaspillé
  • En France, 50% du gaspillage se fait à la maison
  • Un français gaspille 20kg d'aliments par an
  • Les légumes et les fruits sont des plus gaspillés avec respectivement 31% et 19% des pertes

Qu'est ce que la lactofermentation ou fermentation lactique?

La lactofermentation est la transformation des glucides en acide lactique par les ferments lactiques (micro-organismes spécifiques naturellement présents).

Cette fermentation est utilisée depuis des siècles pour la conservation du lait (ex: yaourt), des légumes (ex: choucroute), de la viande (ex: saucisson) ou encore du poisson (ex: Nuoc-mâm).

Comment est-il possible de conserver des légumes grâce à la fermentation lactique?

Les légumes portent sur leur surface des micro-organismes (champignons microscopiques, bactéries) qui, laissés à l'air libre, provoquent la putréfaction. En l'absence d'air (anaérobie) et en présence d'une légère quantité de sel qui inhibe les autres ferments, ceux de la famille des ferments lactiques prennent le dessus : c'est le début du processus de fermentation lactique.

Ces bactéries se développent en se nourrissant des glucides présents dans les aliments et les transforment en acide lactique. Au fur et à mesure du processus, la quantité d'acide lactique augmentant, le jus devient de plus en plus acide.

Cette acidité neutralise le développement de la putréfaction. Lorsque le milieu devient suffisamment acide (pH autour de 4), les bactéries lactiques sont elles-mêmes inhibées. Le produit devient stable, ce qui permet une longue conservation de plusieurs mois voir années.

Quels types de légumes conserver avec la lactofermentation?

Il est possible de conserver quasiment tous les légumes qui se mangent crus. (ex: choux, concombres, carottes, betteraves, etc)

Quels sont les apports nutritionnels et sur la santé des légumes lactofermentés?

1) Facilitation de la digestion et l'assimilation des nutriments.

Les ferments lactiques permettent de "pré-digérer" les légumes grâce à des enzymes, ce qui facilite la digestion ainsi que l'assimilation des nutriments et minéraux par le corps.

2) Ils sont sources de vitamines.

Les légumes lactofermentés contiennent autant voir plus de vitamines que les légumes crus, notamment les vitamines C, B, K, PP. C'est pourquoi traditionnellement, les navires embarquaient des quantités de choucroute, riche en vitamine C, qui évitaient le scorbut à l'équipage.

3) Ils participent au bon fonctionnement de l'intestin et du système immunitaire.

Les ferments lactiques sont des "pro-biotiques" pour la flore intestinale qui joue notamment un rôle important de barrière immunitaire.

Comment consommer les légumes lactofermentés?

Les légumes lactofermentés peuvent se consommer très régulièrement, tous les jours, en accompagnement par exemple.

Une trop forte consommation d'un coup peut provoquer des douleurs d'estomac dues à une acidité importante.

Ils doivent faire partie d'une alimentation variée et équilibrée.

Y a t-il des risques avec la lactofermentation?

Contrairement à la conservation par traitement à la chaleur (ex: stérilisation) ou à la congélation, qui peuvent présenter de grands risques en cas de problèmes (mauvaises fermetures, décongélation involontaire) et provoquer par exemple le développement de la toxine botulique, la lactofermentation est un procédé très sûr.

Le milieu acide permet notamment d'éviter le développement de pathogène.

Cependant, en cas de doutes, de mauvaises odeurs ou de couleurs inappropriées, ne pas hésiter à jeter la conserve.

Video d'introduction

Matériaux

  • Légumes qui se mangent habituellement crus.
  • Sel fin
  • Eau

Outils

  • Bocaux et couvercles associés, (si possible couvercle verre avec joint)

Étape 1 - Préparation des légumes

  • Eplucher et laver soigneusement les légumes
  • Selon la convenance, les rapper ou les couper en petits dés / fines lamelles
  • Dans le cas de légumes qui n'ont pas vocation à être coupés, les laisser tel quel après lavage (ex: haricot vert)


Étape 2 - Préparation des bocaux

  • Laver soigneusement les bocaux




Étape 3 - Réalisation de la conserve dans le cas de légumes rappés ou découpés

  • S'assurer d'avoir les mains bien propres
  • Disposer une première couche de légumes au fond du bocal (2cm)
  • saupoudrer une pincer de sel (Le principe étant 1-2% du poids des légumes en sel)
  • Si vous réalisez une saumure (eau salée) le principe est 3% de sel dans l'eau. Pour les légumes cela varie de 15g/cl à 25g/cl (plus de sel pour les légumes contenant naturellement plus d'eau)
  • Tasser la couche de légumes, par exemple à la main

Remarque: Tasser permet de faire pénétrer le sel dans le légume afin de favoriser l'extraction de jus et de chasser le maximum d'air

  • Recommencer l'opération jusqu'à remplir le bocal
  • Laisser 1 à 2 cm de vide entre le couvercle et la dernière couche de légumes: la fermentation dégageant du gaz, du jus peut déborder en cas de remplissage trop important
  • Bien vérifier que tous les légumes soient recouverts de leur jus jusqu'en haut du bocal: c'est ce jus qui garantie l'anaérobiose, l'absence d'oxygène. Si besoin il est possible d'ajouter un poids (en verre, un sac plastique rempli d'eau, ou avec une feuille de chou, batonet de carotte) afin de maintenir les légumes sous le liquide.
  • Fermer le bocal et déposer sur une assiette (le gaz peut faire déborder un peu de liquide)
  • Laisser 3 jours à vue dans la maison pour déclencher la fermentation des ferments lactiques naturellement présents. Suivant les légumes et la taille (plus les morceaux sont petits plus la fermentation est rapide) il est recommandé de laisser fermenter entre 7j et un mois.
  • Il est recommandé de laisser les bocaux fermenter puis de les stocker dans un lieu sombre et frais. La conservation peut être plus d'un an tant que le bocal n'est pas entammé.



Étape 4 - Réalisation de la conserve dans le cas de légumes entiers

  • Remplir le bocal du maximum de légumes possible
  • Ajouter de l'eau salée (3% du poids en eau soit entre 15g/50cl et 25g/cl suivant la quantité d'eau naturellement présente dans le légume)
  • Bien vérifier que tous les légumes soient recouverts d'eau jusqu'en haut du bocal, c'est l'eau qui garantie l'anaérobiose, l'absence d'oxygène. Si besoin il est possible d'ajouter un poids (en verre, un sac plastique rempli d'eau, ou avec une feuille de chou, batonet de carotte) afin de maintenir les légumes sous le liquide.
  • Fermer et placer une assiette pour le cas où du liquide s'échaperai avec un peu de gaz
  • Laisser 3 jours à vue dans la maison afin de lancer la fermentation des ferments lactiques naturellement présents. Suivant les légumes et la taille (plus les morceaux sont petits plus la fermentation est rapide) il est recommandé de laisser fermenter entre 7j et un mois.
  • Il est recommandé de laisser les bocaux fermenter puis de les stocker dans un lieu sombre et frais. La conservation peut être plus d'un an tant que le bocal n'est pas entammé

Étape 5 - Guide indicatif des salaisons et temps de fermentation


Conserves lactofermentees Guide.png
Quelques idées d'associations :
  • Betterave, ail, carottes et celeri
  • Navet et ail des ours
  • Asperge et poivre
  • Piment type sauce "Tabasco"
  • Aubergine, ail, sésame et thym -> le fameux caviar d'aubergine fermenté de NiCruNiCuit!

Étape 6 - Consommation

  • Un bocal peut être ouvert et consommé sur plusieurs jours sans problème, ça n'exclue pas de dimensionner les bocaux au nombre de personnes de la maisonnée
  • Consommer les légumes lactofermentés un petit peu tous les jours pour en tirer le meilleur profit (cf intro)
  • Pour éviter toute contamination il est recommandé de prélever les légumes fermentés avec un couvert propre et de ne pas vider le jus (aide à la conservation). Il n'est pas obligatoire de placer le bocal au frigo une fois ouvert.

Étape 7 - Recette du Kimchi

Le Kimchi est une recette coréenne traditionnelle. Elle est basée sur la lactofermentation du choux et d'épices.

  • 2 kg de chou chinois
  • 2 poireaux
  • 1/2 navet long
  • 3 gousses d’ail hachées
  • 2 cuillerées à café de gingembre frais râpé fin
  • 1 ou 2 cuillerée à café de sauce de poisson (optionnel)
  • 1 cuillerée à soupe de piment rouge haché
  • 1 cuillerée à soupe de sésame grillé
  • 1 cuillère à soupe de sucre
  • 100 à 160g de gros sel
  1. Coupez le chou en lamelles dans le sens de la longueur et mettez-le dans un saladier rempli d’eau tiède salée. Saupoudrez le chou de gros sel (à mettre entre chaque feuille). Laissez reposer et dégorger pendant une nuit.
  2. Le lendemain, rincez les lamelles de chou à l’eau et égouttez-les. Dans un autre saladier: Coupez le navet et les poireaux en fines lamelles d’environ 5 cm
  3. Mélangez les ingrédients pour faire la pâte d’épices : gingembre,piment rouge, ail,sucre et sauce de poisson. Il faut tout éplucher ou râper afin de faire la pâte. Étalez cette pâte entre les feuilles de chou. Déposez les morceaux de chou dans un grand récipient. Saupoudrez avec un peu de sésame grillé.
  4. Placez un couvercle ou une assiette sur le récipient, ou fermez-le hermétiquement. Il faut maintenant attendre 4 à 5 jours pour que le kimchi fermente. Il est à consommer dans les jours suivants l'ouverture du pot et peut se conserver environ trois semaines au frigo.



Étape 8 - Recette du Natto (soja)

1kg de soja jaune sec pour 0.1g de Bacillus subtilis (ou Bacillus natto).

Bien laver le soja avant de le laisser tremper toute une nuit dans une grande quantité d’eau. Le cuire à la vapeur jusqu’à ce que les graines restent entières mais soient suffisamment molles pour être écrasées entre deux doigts. Dès qu’il est cuit, le laisser refroidir avant de le verser dans un récipient d’environ 5cm de profondeur. A 40°C environ, répandre uniformément sur les grains la bactérie Bacillus subtilis. Bien mélanger et niveler la surface. Laisser incuber 6-8h pour obtenir une saveur douce et des fils modérément développés. Après 12h d’incubation les saveurs sont plus fortes et les fils sont plus longs. Consommer le nato dans les jours qui suivent en le conservant au frigo.


Au restaurant « Au Grand Appétit » les deux dernières étapes sont remplacées par celles-ci : lorsque la température atteint 70°C, ensemencer le soja avec la bactérie puis laisser fermenter 20 à 24h à 37°C ; il se couvre alors d’un enduit visqueux : les futurs fils. Selon François David, l’animateur expérimenté du restaurant, très peu de bactéries suffisent pour ensemencer un peu plus de 2L de soja : « Une pointe de couteau suffit ».




Étape 9 - Recette du Nukazuké

Légumes fermentés dans une pâte au son de riz (mais en Europe il est plus facile de le faire au son de blé). C’est un produit qui fonctionne de manière similaire à un levain, il faut donc en prendre soin tous les jours et au long terme.

Pour 2 personnes :

  • L’équivalent de 100g de légumes tranchés (ex : aubergines, carottes, navets, concombre, radis, courgettes, oignons...)
  • 130-140g de sel (13-14% du poids en son de riz)
  • 1L d’eau (poids du son de riz est égal à celui de l’eau)
  • 1kg de riz blanc

Avant de commencer bien rincer les légumes et nettoyer avec application l’intérieur des récipients en enlevant la pellicule blanche qui peut s’y trouver (mycoderme). Dans un cuveau en bois ou un grand pot en grès, verser l’eau, le sel et le son. Mélanger soigneusement jusqu’à obtenir une pâte d’une consistance à la limite de la fluidité. Frotter les légumes au sel (en appuyant fort) puis les plonger dans la pâte 2-3 jours. Au bout de 12h les légumes développement déjà un léger gout, suivant la température les légumes sont prêts en 1-2 jours (surtout en été). Les légumes doivent être légèrement mou au toucher. Les rincer de la pâte et les couper avant de les manger. La pâte demeure active très longtemps du moment qu’une fois les légumes sortis on la remue tous les jours. En cours de fermentation les légumes perdent un peu de leur eau au profit de la pâte, mais il faut parfois ajouter un peu de son et du sel (voire un peu d’eau en été) pour garder une consistance optimale. Si le son a été obtenu d’une mouture ancienne pensez à le chauffer à sec à la poêle sans le faire griller afin de détruire les possibles germes en cours de développement.




Étape 10 - Contenu pédagogique à télécharger

Vous pouvez télécharger une fiche pédagogique créée par le Low-tech Lab à l'occasion de l'exposition "En Quête d'un Habitat Durable" dans la partie "Fichiers" du tutoriel (onglet au niveau de la section "Outils-Matériaux").

Alice Martin-Demolon vous propose également dans cet onglet un recueil d'informations et de recettes fermentées (conserves, boissons, pain, produits laitiers...). N'hésitez pas à le télécharger.




Notes et références

Commentaires

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